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Derrière Warm Soda, se cache Matthew Melton, moustachu le plus cool de la côte ouest US, musicien prolifique et membre hyperactif de la belle écurie Castle Face Records (Thee Oh Sees, White Fence, Ty Segall, The Mallard, Fresh & Onlys etc…). On associe souvent à tort cette scène « San Franciscaine » à la nouvelle génération garage, mais à y regarder de plus près, cela n’a pas de sens tant ses différents groupes touchent à plusieurs genres musicaux.
Le talent de Melton, et il en a un sacré, réside évidemment dans sa facilité à pondre des chansons aux mélodies irrésistibles, portées et enluminées par un art du riff dévastateur. Cette succulente recette l’emmène sur un terrain rock façon power pop et glam, univers soutenu par une esthétique « Rock and Roll High Schoolesque » hilarante comme on peut le voir dans les vidéos clips de ses différents projets.
Pour situer rapidement sa belle et déjà riche carrière, le jeune homme a sorti entre autres singles et EPs, un LP avec les Snake Flower 2 (2008), quatre avec les Bare Wires (2009 à 2012), un solo (2010) et un avec sa dernière formation, Warm Soda et leur brillant « Someone For You » sorti cette année chez Castle Face Records.
Ce fut donc un honneur d’avoir pu le rencontrer à l’occasion de la première et excellente édition du City Sounds Festival, Edition San Francisco qui avait lieu au 104 (19 et 20 Juillet 2013). Le concert des Warm Soda fut d’ailleurs un très beau moment de rock and roll qui nous a comblés au plus haut point.
Et c’est avec beaucoup de sympathie que Matthew Melton a bien voulu répondre à nos questions…
x Nous sommes au City Sounds Festival - Edition San Francisco, peux-tu nous parler de ta rencontre avec John Dwyer (Thee Oh Sees / Castle Face Records) qui est un peu le parrain de cette scène ?
Matthew Melton : Alors que je me rappelle… Mon 1er groupe à San Francisco s’appelait Snake Flower 2 et on avait joué avec Thee Oh Sees et Jay Reatard, ça devait être lors de ma 1ère année quand j’ai emménagé là bas. Quelque temps plus tard, à l’époque de Bare Wires, on a joué plusieurs fois et commencé à travailler ensemble. John Dwyer est un mec génial, et qui fait énormément pour la scène de SF.
x Peux-tu nous raconter le passage de Bare Wires à la création de Warm Soda ?
MM: Et bien, on (ndlr : Bare Wires) était en tournée aux US et notre batteur a fait une overdose. C’était vraiment un sale moment. Il a fini à l’hôpital en mauvais état… Donc on a évidemment dû repartir, j’ai laissé notre bassiste à Austin, déposé notre batteur chez sa mère à El Paso avant de revenir à San Francisco.
Ça a déclenché chez moi, l’envie de donner une autre direction à la musique que je faisais jusqu’à présent, j’ai donc décidé de tout effacer et de repartir de zéro.
Cela m’a donné de nouvelles perspectives et un angle différent, et je suis aujourd’hui bien content d’avoir effectué cette transition.
x Est-ce que tu pourrais reprendre des chansons de Bare Wires? Car vous avez sorti pas mal de choses…
MM : C’est une bonne question ! Je ne sais pas vraiment si ça arrivera un jour bien que je n’y sois pas foncièrement opposé. Pourquoi pas dans le futur ! Mais je ne sais pas, je pense que je préfère aller de l’avant et laisser derrière moi ces chansons, un peu comme des preuves, plutôt que de toujours répéter son passé et ses idées.
C’est important pour moi d’avancer.
Pour l’instant on a presque fini le nouvel album de Warm Soda, je pense qu’il sortira en automne chez Castle Face Records. J’ai aussi 24 chansons prêtes pour mon nouvel album solo. Donc on avance sur tout ça et revenir en arrière, pour moi, serait comme prendre une mauvaise direction.
x Passons à Fuzz City? C’est quoi, exactement ?
MM : Tout d’abord, il faut savoir que j’ai toujours pas mal bougé, je me considère un peu comme un vagabond. Je n’ai d’ailleurs pas de vraie maison ou appartement nulle part. Mais j’ai ce studio d’enregistrement à Oakland.
Au tout début, j’étais basé à San Francisco, mais c’était juste un enregistreur analogique 8 pistes reel-to-reel, posé dans mon van. Et donc j’allais chez les gens et je les enregistrais comme ça. Ou alors on se mettait dans leur cuisine ou la salle de bain, on enregistrait dans plein d’endroits bizarres, c’était assez marrant d’ailleurs !
On est basé à Oakland depuis 1 an et demi avec le studio et le label, Fuzz City Records.
On a sorti quelques trucs sur celui-ci mais, pour l’instant on se consacre principalement à l’enregistrement, c’est ce qui nous semble le plus important.
On travaille avec des groupes, on essaie de leur donner les bonnes conditions pour qu’ils puissent créer dans un environnement stimulant et arriver à un certain son. On fait également du mastering. J’adore travailler avec des musiciens et produire, le processus créatif m’enchante vraiment !
Mais je ne sais pas du tout où je vais… Je pourrais déménager Fuzz City n’importe où ! Le truc cool à Oakland et San Francisco c’est qu’il y a toujours pas mal de groupes avec qui bosser.
Mais je peux me poser la question, pourquoi ne pas faire Fuzz City… à Berlin ? … à Londres ?
Pourquoi ne pas changer de ville tous les deux ans ? Je me pose souvent cette question à savoir si je devrais rester lié à un endroit ou non car le fait de bouger rend les choses intéressantes, ça stimule ta vie.
J’ai été dans pas mal d’endroits et je ne sais vraiment pas où je pourrais vraiment me sentir chez moi. Je pense que je dois encore voir le monde… Au moins pour l’instant je suis toujours en mouvement.
x Est-ce qu’il y a une philosophie particulière en terme de son chez Fuzz City?
MM : Oui définitivement. Je pense que tout doit être enregistré sur des bandes analogiques. Ça joue un gros rôle en terme de son. On enregistre par exemple sur des quarter-inch tapes, ça te donne un son assez caractéristique.
On utilise également pas mal de vieux micros, ça donne quelque chose d’assez « sincère » et on passe très peu par le numérique. On peut enregistrer en analogique et le repasser en numérique pour le retransférer sur de l’analogique par exemple. Au final ça va te donner un son, avec une saturation produite par la bande, compressé, assez délimité et définitivement mid-fi. Je pense que c’est ça le Fuzz City Sound. Ça sonne bien, tu as une bonne dynamique mais aussi beaucoup de caractère !
x Le format vinyle, c’est la finalité de tout ça ?
MM : Je suis définitivement persuadé que le vinyle est le meilleur format pour écouter de la musique. Tout simplement pour la qualité sonore mais également car c’est celui qui durera le plus longtemps (en terme d’archive). Le CD peut se rayer en quelques utilisations, le digital peut être effacé, ou alors tu n’as plus d’électricité et alors plus de numérique.
x Tu es méfiant face aux nouvelles technologies ?
MM : Aujourd’hui, et particulièrement à cause des iPhone et d’internet qui absorbe tellement tout le monde. Tout est digitalisé…
Je pense que ce n’est pas une bonne chose, ça force les gens à vivre dans le passé car tout ce qu’ils voient sur leur iPhone est un enregistrement de quelque chose qui s’est déjà passé. Tu passes ton temps à regarder ton passé et tu loupes le moment présent !
x Au sujet de tes chansons, elles parlent beaucoup d’amour, avec un côté un peu teenage et romantique (au sens touchant et innocent du terme). Quel est ton point de vue par rapport à ça ?
MM : C’est une bonne question ! Il faut savoir que mes chansons ne racontent pas une situation spécifique que j’ai pu vivre ou ne parlent pas d’une personne réelle mais plus d’un sentiment que j’ai pu ressentir.
Je vais prendre ce sentiment et pour pouvoir l’exprimer, je vais l’imaginer à travers le regard de différents personnages. Je vais raconter quelque chose depuis cette perspective. C’est de la personnification.
Je prends un sentiment intense et j’essaie de l’exprimer de façon authentique avec peut-être le risque de sonner comme une chanson d’amour un peu « kitsch ». C’est un risque que j’assume car je sais que ce que j’exprime est sincère.
x Est-ce que tu as finalement trouvé l’amour ?
MM : Disons que je ne suis pas ce type de personne. Je suis quelqu’un qui, en quelque sorte, a une incapacité à aimer. Il y a probablement des raisons à ça, comme par exemple le fait d’avoir eu le cœur brisé très jeune, parmi plein d’autres choses. Mais je trouve aussi que c’est très stimulant en tant que songwriter car je me dis que si tu trouves l’amour, tu auras moins d’intérêt à écrire des chansons, tu manqueras d’une certaine intensité, d’une certaine tension. Tu ne peux pas avoir cette espèce de manque qui peut te pousser à faire de la musique.
x J’ai lu quelque part que tu étais fier d’avoir pu voyager en Europe, sachant que ta famille n’y était jamais allée?
MM : En fait ma famille est originaire d’une petite ville appelée Melton Mowbray en Angleterre. Ils ont émigré à West Memphis, Arkansas, dans les années 1900 et depuis ce temps là, personne n’a jamais bougé ou fait quelque chose. Ce sont des gens assez simple, avec beaucoup de musiciens dans la famille et pour ma part, j’ai toujours eu envie de voyager. Je suis également le dernier dans la lignée, donc ça s’arrêtera ou continuera avec moi, ça a aussi joué. C’est assez drôle d’ailleurs car nous étions hier à Londres et j’ai rencontré des gens qui venaient de Melton Mowbray avec qui j’ai eu une certaine connexion…
Donc oui, ça a toujours été un rêve pour moi de parcourir le monde avec mes chansons, j’ai beaucoup travaillé pour en arriver là et je vais continuer d’en profiter.
x Tu bois quoi comme soda chaud (Warm Soda) ?
MM : En fait, je suis très concerné par ma bonne santé, je ne bois donc pas de soda…
Principalement car cela contient du sirop de maïs à haute teneur en fructose, une sorte de sucre fabriqué chimiquement et très difficile à traiter par le corps humain…
x Donc tu bois de l’eau ?
MM : Je bois de l’eau, l’eau c’est génial. Le corps humain est constitué d’environ 70% d’eau donc ça parait normal de continuer à la faire couler en toi…
B.
Merci à Ju et Clarisse Vallée
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